L'attaque de la flottille par l'armée israélienne est-elle exceptionnelle?

Publié le par Erwann

 

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Trois jours après l'assaut des commandos israéliens contre la flottille de navires humanitaires pro-palestiniens, l'état hébreu est au coeur de la tourmente médiatique. Si l'opération a été considérée comme une réussite d'un point de vue militaire puisqu'elle a atteint ses objectifs (empêcher les navires d'atteindre Gaza), elle est en revanche catastrophique en terme d'image et ce malgré les tentatives du gouvernement israélien pour donner sa version des faits.

 Mis à part un communiqué de l'UMP en France et du gouvernement italien qui, tous deux, mettaient en avant les «provocations» des activistes, la grande majorité des Etats ainsi que des personnalités à travers le monde n'ont fait que condamner cette opération. Les ambassadeurs israéliens n'ont d'ailleurs pas chômé puisqu'ils ont été convoqués dans quasiment toutes les capitales européennes pour s'expliquer sur l'opération.

 Au niveau intérieur il est plus difficile de savoir quel impact a eu cette action. Il est certain que l'idée était de montrer avant tout au peuple israélien que quelques pacifistes venus d'un peu partout ne feraient pas plier le gouvernement, et de ce point de vue on peut imaginer que le message est bien passé. Pourtant si l'on en juge par les unes des journaux nationaux ces derniers jours, il semblerait que quasiment tous mettent en avant l'impact désastreux que cela a eu sur l'image déjà passablement écornée d'Israël à travers le Monde.

Car une chose est certaine, depuis la bataille de Gaza il y a plus d'un an, Israël a de plus en plus l'image d'un Etat agresseur, intransigeant et qui n'hésite pas à faire payer à une population entière les actions de quelques uns. Et les décisions récentes du gouvernement de droite-extrême droite actuellement au pouvoir n'ont pas franchement calmé les choses, au point même de créer pendant quelques semaines une crise ouverte inédite entre Israël et son indéfectible allié américain. Dans ce contexte la décision d'arraisonner la flottille, qui plus est dans les eaux internationales, alors que celle-ci n'avait, tout du moins à ce moment-là, violé aucune loi, n'était franchement pas heureuse.

Surtout, cette opération a jeté à la face du monde une réalité qui jusqu'à présent n'apparaissait qu'en pointillés, au gré des événements: l'armée israélienne n'hésite pas à employer la force et cherche à blesser, si possible à tuer. Il ne s'agit plus de classiques opérations de maintien de l'ordre. Cela était déjà vaguement apparu lors de la mort très médiatisée du petit Mohamed, tué dans les bras de son père sous les yeux d'une caméra. Cette image, qui avait fait le tour de monde, avait énormément choqué à l'époque mais cela c'était peu à peu estompé.

Régulièrement pourtant, et depuis très longtemps, au nom d'+impératifs de sécurité+ ou de +lutte anti-terroriste+, l'armée israélienne n'hésite pas à employer une force sans limite et disproportionnée, sans aucun respect de la vie humaine. Pour ne citer que quelques exemples pris au hasard, dans les années 90 un photographe de l'Agence France Presse avait été pris pour cible par un soldat israélien qui lui avait explosé volontairement le péroné, le photographe s'en est tiré avec une année d'hospitalisation au Val de Grâce, afin de reconstituer l'os, puis plusieurs mois de rééducation. L'un des navires de la flottille, qui faisait d'ailleurs hier toujours route vers Gaza, porte le nom de Rachel Corrie, une militante américaine pro-palestinienne écrasée par un bulldozer israélien à Gaza en 2003.

Une fois n'est pas coutume je vais également me permettre de raconter une petite anecdote personnelle qui me revient en tête. Au début des années 90, quelques mois avant la signature des accords d'Oslo et alors que la première Intifada venait de se terminer, j'ai eu l'occasion d'aller en Israël et en Palestine en vacances. Nous étions à Hébron, entre autres pour visiter le caveau des Patriarches. Ma mère s'était ensuite rendue chez un céramiste et mon frère et moi, encore enfants, attendions dehors pour jouer plutôt que nous ennuyer à l'intérieur. A un moment mon frère commence à ramasser un caillou par terre, comme cela arrive souvent à un enfant. Ma mère et les céramistes palestiniens sortaient à ce moment-là de la boutique et l'un d'eux s'est précipité vers mon frère pour le faire lâcher la pierre. Il nous expliqua, en montrant une voiture de patrouille israélienne que si les soldats l'avaient vu avec la pierre, ils n'auraient pas hésité à nous tirer dessus. C'est dans ce climat que vivent les Palestiniens depuis de nombreuses années et c'est cette logique qui a prévalu dans l'opération menée par l'armée israélienne lundi dernier.

Personne faisant preuve d'un minimum de bonne foi ne peut nier à Israël le droit de vivre en paix et en sécurité comme n'importe quel Etat au Monde. Mais les Palestiniens ont exactement le même droit. Ils ont également, comme le stipule la charte de l'ONU signée par Israël, le droit de disposer d'eux-même, tel que cela est inscrit dans le préambule. C'est pour ce droit qu'il y a des manifestations pour le Tibet, que l'on a donné son indépendance au Timor Oriental ou que le Kosovo a été défendu par la communauté internationale.

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